L’experience
« Durant la préparation de notre premier voyage au Brésil, le Pantanal devient rapidement l’une des étapes évidentes de notre parcours. Une incursion au coeur de cette immense réserve naturelle, entourée de forêts, étangs et animaux sauvages, rythmée d’excursions sur le rio Paraguay et de treks dans les bushs environnants, quoi de plus dépaysant pour les citadins que nous sommes
Nous décidons de démarrer notre séjour via Campo grande, l’une des principales portes d’accès à cette zone naturelle. Sur place, au sortir de la gare routière, nous réservons rapidement un tour de 3 jours; nous serons accompagnés d’une routarde allemande et d’une étudiante en médecine néerlandaise. Sur place, un guide natif du Pantanal nous attend déjà.
Après 3h de route dans un mini van, il nous faut encore prendre un pick up pour accéder à notre pousada (bed and breakfast au Brésil), au coeur du Pantanal via l’Estrada Parque, une piste poussiéreuse entrecoupée de pontons d’où l’on peut déjà voir à quelques mètres de nous des regroupements de caïmans. 1h30 plus tard, nous voici arrivés à destination avec déjà ce sentiment d’être dans un lieu magique, qui marquera nos esprits. Un lieu isolé et si vivant à la fois, si peu d’hommes mais tellement d’animaux nous entourant, nous remarquant à peine, nous sommes sur leur terre. Dès notre première ballade en forêt, le soir, accompagnés de Sandro notre guide anglophone, je remarque cet immense respect entre l’homme et l’animal. La cohabitation avec des animaux que nous, occidentaux, considérons dangereux est en fait évidente dès lors que chacun respecte l’autre. Par la suite, toutes mes peurs et inhibitions face aux caïmans se seront envolées, m’aventurant sans appréhension dans un étang, entourée de deux bébés caïmans et de leur maman.
Mais le temps fort de notre séjour au Pantanal, reste cette invitation spontanée de notre guide à participer à un barbecue au ranch voisin. Le deuxième soir, Sandro nous explique que la fazenda (grande propriété agricole au Brésil) d’en face organise un barbecue car ils viennent de tuer une vache et la tradition est d’y convier le voisinage. Il nous propose de l’accompagner, car il pense qu’en tant que touristes, cela pourrait nous intéresser. C’est quelque chose qui sort des circuits classiques, nous acceptons d’emblée. Nous avions bien sur déjà remarqué toutes ces vaches paître sur ces immenses étendues ainsi que les quelques cow boys chargés de s’occuper de leurs troupeaux, mais si Sandro ne nous avait pas invité, nous n’aurions jamais rencontré ces gens et écouté leurs histoires.
Sur place, des hommes de tous âges, se réunissant autour d’un barbecue de fortune et déjà une délicieuse odeur de viande grillée. Notre arrivée fait sourire mais n’étonne pas, on nous accueille avec gentillesse et chaleur. Le plus simplement du monde, nous nous retrouvons à dévorer chacun un rib avec les doigts et c’est un délice!
Je ne sais pas comment ils avaient tué la vache mais je pencherais pour un abattage traditionnel parce qu’il n´y avait aucune structure aux alentours suffisamment grande pour un abattage industriel Et je sais qu´ils l’avaient abattue à peine quelques heures auparavant. Les brésiliens qui étaient autour du barbecue semblaient trouver normal de manger la vache qu’il venaient de tuer. Probablement parce qu’elle avait été élevée pour ça. Ils respectent leur troupeaux, ils en prennent soin et à nos yeux, au moment où nous nous régalions, ils n’étaient pas du tout dans la culpabilité d’avoir tué un animal pour se nourrir, cela rentrait simplement dans le cycle de leur vie.
Nous discutons avec deux jeunes gauchos (gardiens de troupeaux) et très vite ils nous montrent fièrement sur leurs smartphones dernier cri des vidéos d’eux-mêmes et de collègues en train de dresser un cheval sauvage. C’était incroyable, à des milliers de kilomètres de notre vie confortable, nous discutions avec des hommes qui nous expliquaient pourquoi ce cheval sur ces vidéos était si fou et surtout pourquoi ces hommes tentaient de braver cette folie. Le cheval se cabrait, il bondissait et le cavalier tenait bon; nous assistions à une retransmission d’un véritable rodéo, au coeur du Pantanal. Ce cheval devait avoir 5 ans. A sa naissance, les cow boys avaient décidé qu’ils ne serait pas dressé mais resterait sauvage jusqu’à un certain âge. Suite à ces années de liberté, le dressage commence alors, péniblement. Une fois apprivoisé, cet animal sera bien plus puissant et fougueux qu’un congénère dressé par la main de l’homme depuis son plus jeune âge. Une part de liberté et d’ardeur sera toujours présente au plus profond de lui. Par la suite, il servira à rattraper des troupeaux égarés et s’avérera bien plus rapide lors de situations difficiles avec le bétail. Sur ces videos, les jeunes garçons semblaient s’amuser mais en fait l’enjeu était bien réel et important; cette étape faisait partie intégrante de leur travail au sein de la fazenda. Par le biais de ces vidéos que nous aurions très bien pu retrouver sur notre fil d’actualités Facebook, ces gauchos étaient avant tout fiers de nous montrer leur travail et leur quotidien.
Cette soirée restera l’un de nos plus beaux souvenirs de voyage et demeure aujourd’hui une expérience que nous racontons régulièrement à notre entourage. »
Qui raconte
Brésil, 2016
Trentenaire et styliste de mode féminine responsable, Maïwenn Vinchon (France) est curieuse de découvrir une culture par la marche à pied et l’échange avec les locaux. Lors d’un voyage, elle prévoit un itinéraire général qu’elle n’hésite pas à revisiter au fil des rencontres. Cette spontanéité et ouverture d’esprit l’auront récompensée avec cette expérience si simple mais tellement éloignée de ce qui lui est accessible à Paris.